16 octobre 2013

Expérience touchante

Il y a quelques semaines, la présidente du SAS avait reçu un email de deux jeunes-hommes suisse venant visiter Singapour. Ils demandaient s’il y avait peut-être un membre de l’association qui pourrait les guider à travers la ville durant quelques heures. Rien de particulier à cette demande pensez-vous? Mais si, les deux hommes de 21 et 26 ans sont aveugles ; un à 100% et l’autre à 98%. Quel drôle demande se disait la présidente, mais envoyait quand même cet email aux membres.
Vu que leur date correspondait à un tour guidé organisé par le SAS, en plus le soir, je suggérais de les y inviter, comme ça il bénéficieront d’un bon guide et de l’aide par mon mari et moi, présents à ce tour. L’affaire était vite réglée et tout le monde attendait cette soirée pour découvrir ce que des personnes aveugles puissent découvrir dans une ville qui leur est inconnue.
Au lieu de rdv, on pouvait découvrir deux jeunes hommes pleins de joie de vivre, drôle et plein d’humour! Notre guide nous décrivait l’histoire du bâtiment du Musée National de la ville, de dehors et de dedans puis on traversait la route à l’arrière du bâtiment pour pénétrer dans le Parc Fort Canning et son parcours des épices.

Y. et J. nous touchaient à peine le coude de deux doigts de leur main gauche et tenaient la canne blanche dans la droite. Très vite nous avions réalisé qu’il fallait parler, raconter tout ce qui croisait notre chemin, car nous étions leurs yeux ! Si on arrête de parler, ils seront aveugle pour de bon… (Facile pour moi, car j’ai la parlotte…) Mais décrire une ambiance, des formes et des couleurs, pas si évident que cela, un vrai exercice d’observation.
Voir leur envie de découvrir, d’apprendre, malgré leur handicap majeur vous donne de l’humilité, on devient tout petit et on réalise à quelle point nous sommes privilégiés possédant deux yeux en pleine santé ! Nous n’arrêtions pas de leur poser des questions, car bien des choses nous semblait juste impossible à réaliser, mais pas pour eux. Il faut être confiant et oser d’approcher les gens, sinon on sombre dans la pénombre. Ecoutant leurs récits, je suis persuadée qu’ils ont développé un sixième sens, qu’ils « sentent » les gens avant de leur faire confiance, car dans bien des situations ils sont dépendants de leur aide. Dans un restaurant, à l’aéroport, dans le taxi, etc. Le restaurant, nous l’avons fait avec eux et je vous avoue qu’ils m’ont bluffé avec leur aisance de se retrouver avec leurs plats et de la manière de manger ; essayez une fois de vous servir une assiette et de manger proprement dans l’obscurité totale, pas évident, car pour nous, les voyants, ce sont des gestes guidés par nos yeux. Puis la facutre : après avoir passé seulement un jour et demi dans la cité-état, ils nous sortaient les billets de banque pratiquement sans hésitation de leur portemonnaie, même les pièces de monnaies étaient les bons… Je n’en revenais pas.

Un peu inquiet, nous les placions dans un taxi en priant le chauffeur de les amener à bon port et de leur donner un coup de main. Durant la soirée, un des garçons racontait qu’en arrivant à l’auberge à Singapour, le chauffeur ouvrait le coffre de son véhicule en leur disant de prendre leurs bagages… « Mais du quel côté dans le coffre se trouvent nos bagages Monsieur ? Vous savez, nous sommes aveugles et ne voyons pas leur emplacement ni de quel côté de la rue se trouve l’auberge ! » Vous le croyez ? Comment peut-on agir de la sorte ! Mais Y. disait comme quoi il n’était pas poli non plus, il n’a pas fermé la capot du coffre…
Après les avoir mis dans les mains du chauffeur de Taxi, mon mari et moi sommes rentrés chez nous, le cœur rempli d’émotions, d’humilité et d’admiration !

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